Cela fait bien longtemps que je n’ai pas lu un livre aussi atypique sur l’affaire de Rennes que celui de Philippe Duquesnois, qu’il vient de faire paraître sous le titre À l’origine de l’affaire de Rennes-le-Château, le dossier Cros. Les textes fondateurs (juillet 2023).
Il débute en citant les noms de ses deux anges tutélaires dont je me garderais bien d’envier la protection.
La méthode de travail de Philippe Duquesnois est celle de l’entonnoir. Il ratisse large la question qu’il veut traiter et fait passer lentement le filet de sa logique, jusqu’à obtenir le résultat qu’il avait prévu au départ.
Il a la fâcheuse manie de se présenter comme un précurseur pour de vieilles lunes déjà démontrées depuis vingt-cinq ou trente ans. C’est le cas pour cette ressemblance de texte Charroux/ Antoine l’Ermite et la modification d’une des lignes de fin de chapitre.
À priori, M. Duquesnois n’a jamais été gratifié d’un vrai contrat éditeur ! Il aurait convenu que les mentions figurant sur le “document Julliard”, offert en pâture par Pierre Plantard à ses lecteurs, était un ajout inconcevable. Dire, trivialement, que l’un aura 65 % des droits d’auteur, l’autre 35 %, cela n’existe pas. D’autant qu’il s’agit de 65 ou 35 % de… 10 % ! C’est dire si le subterfuge est fait pour impressionner les esprits simples.
J’ai apprécié l’exercice d’équilibriste de notre ami lorsqu’il convient – ENFIN – de l’existence de cette lettre à Cros où Saunière demande comment on mesure la hauteur d’une montagne. Mais plus encore pour dire que ce document – avec d’autres (dont l’attestation de la découverte de la oule, hé oui…) – avait été vendu par … Alain Chatillon (A.C. ) à … Jean-Pierre Quignard (JPQ.) Stop à la langue de bois !
Si M. Duquesnois tend à démontrer que le rapport Cros a été rédigé dès 1967 (le cambriolage du châlet ayant sans doute eu lieu à la période de noël 1966), sa petite enquête fait ressortir que Cros s’est bien livré aux recherches qu’on lui prête. D’ailleurs, cette affaire de pierre écrite relevée par Cros était déjà connue antérieurement (articles de Noir et Blanc, notamment).
Dans son exercice de débunking, Philippe Duquesnois cherche à prouver que l’affaire de Rennes n’existe pas, sinon que c’est un pur roman plantardien. Il cite Laurent Buchholtzer pour dire que Plantard rencontra Marius Fatin et que, de ce jour, l’affaire des Mérovingiens était bouclée. Or, Buchholtzer que les internautes ont connu sous le pseudo d’Octonovo est un chercheur tardif. Des premières années de l’an 2000. Même si c’est un homme sympathique et consciencieux, on ne voit pas où chercher sa compétence pour des faits remontant à plus de quarante ans en arrière, pendant que d’autres, contemporains, ne sauraient être catégoriques.
Sur cette affaire de “stèle” de la marquise, dont Plantard aurait appris l’existence entre 1963 et 1965, M. Duquesnois n’a même pas pensé au livre de René Descadeillas, paru en septembre 1964, Rennes et ses derniers seigneurs. Non seulement le savant conservateur évoque cette pierre tumulaire en p. 71, mais insiste sur sa nature incongrue. Et M. Descadeillas de citer dans les pages de la bibliographie ( en p. XXII) l’article d’Elie Tisseyre. Or, bien sûr, Plantard connaissait le livre de René Descadeillas puisqu’il le cite à deux ou trois reprises dans ce que l’on peut nommer “les apocryphes”.
Pour dire que l’auteur des parchemins est Pierre Plantard, M. Duquesnois fait voir que l’on trouve la mention “Bergère” dans le “Lobineau” qu’il date de 1963 (?) (“… avant janvier 1964”), alors que ce dossier a été déposé à la B.N. le 27 avril 1967 !
C’est ne pas évoquer la querelle entre Plantard et Cherisey (dès1966), lequel détenait les parchemins que Plantard rechignait à voir publier. Par dépit, Cherisey les adressa anonymement par la Poste à Gérard de Sède, pendant que celui-ci tergiversait à signer le contrat Julliard. En novembre 1967, Plantard fut mis devant le fait accompli. La seule chose, c’est que de Sède ignorait que le “Petit Parchemin” était dénaturé et qu’avec le “Grand Parchemin” une note épinglée indiquait son résultat cryptographique, avec cette fameuse formule: Bergère pas de tentation…
Je ne doute pas que Philippe Duquesnois a publié ce livre, À l’origine de l’affaire…” dans l’enthousiasme. Il est le résultat d’un travail opiniâtre, fait passionnément par un passionné. Mais, l’esprit partisan n’est jamais bien loin.
Dès le début de son intérêt pour Rennes-le-Château, cet écrit a tarabusté notre enquêteur. La nature est ainsi faite. Pourtant, le Rapport Cros n’est qu’une fantaisie marginale. Savoir s’il méritait autant de considération ?…
NB. Cette page du “contrat Julliard” fait partie d’un dossier de 112 pages, qui vient d’être réédité en juillet 2023,
en complément de Rennes-le-Château, capitale secrète de l’Histoire de France, de Jean-Pierre Deloux et Jacques Brétigny (éd. Pégase).
Bonjour,
Je vous remercie d’avoir acheté mon livre et de l’avoir commenté sur votre espace que je sais fréquenté.
Merci aussi pour votre avis sur ma passion, mon enthousiasme et la note terminale sur le travail opiniâtre mis pour réaliser ce livre. Le travail, le travail, sans cesse !
J’ai voulu effectivement faire un livre atypique, mais et vous êtes bien placé pour le savoir des centaines de livres ont été écrit sur « RLC » en ajouter un de plus qui se contente de voir ce que les autres ont écrit avec un œil différent n’avait pas d’intérêt pour moi, merci de l’avoir souligné.
J’ai choisi de parler de ce que je connaissais et que les passionnés maîtrisaient peut être moins… Mais je suis obligé de le dire, si j’avais encore un doute sur l’utilité d’avoir fait ce livre atypique, la lecture de votre critique vient de me l’enlever !
Je voudrais aussi faire litière de votre affirmation selon laquelle je « cherche à prouver que l’affaire de Rennes n’existe pas »… mon seul objectif était de regarder de très près, comment on était passé en quelques années de « l’histoire du trésor de l’abbé Saunière » à « l’affaire de Rennes le Château ». Mon but était de chercher à savoir comment une histoire de curé qui a trouvé un trésor a évolué pour devenir une affaire cosmique qui fait intervenir des mérovingiens, des extras terrestres, le Graal, Marie Madeleine et l’alphabet Maya…
C’est cette évolution qui m’intéresse. Et seulement elle, loin de moi l’idée de remettre en cause le fait que Bérenger ait trouvé un trésor.
Vous parlez de contrat d’édition, pour mon premier livre « l’Ambition Barbare » (que vous commentiez déjà dans Pégase il y a 18 ans, comme le temps passe…), j’avais signé avec les éditions Némo à Genève. Je possède sous les yeux un contrat d’édition pour le livre dont nous parlons (Les textes fondateurs…) qui m’a été aimablement proposé par un éditeur de la place, que je remercie encore une fois réellement. Je ne l’ai pas signé pour des raisons personnelles. Pour avoir au moins été « gratifié » deux fois d’un contrat, je peux vous dire que l’on peut y mettre absolument tout ce que l’on veut tant que c’est juridiquement correct.
Encore un mot sur la forme, dans mon livre je ne cite pas les noms que vous donnez dans votre commentaire. Ce coming out est de votre fait. Je ne l’assume pas. Dont acte.
Venons en au fond :
Monsieur Vallet, vous que je considère comme un des meilleurs documentalistes de RLC, aucune ironie dans mon propos, je le crois sincèrement, comment pouvez vous écrire cela, : « Pour dire que l’auteur des parchemins est Pierre Plantard, M. Duquesnois fait voir que l’on trouve la mention « Bergère » dans le « Lobineau” qu’il date de 1963 (?) (« … avant janvier 1964 »), alors que ce dossier a été déposé à la B.N. le 27 avril 1967 !
Voilà pourquoi je juge mon livre utile. Le premier apocryphe est SIGNE par Lobineau et est déposé en janvier 64 à la BN (et c’est bien sûr de celui là dont je parle) alors que ce que l’on appelle le dossier Lobineau est DEPOSE à la BN en 67. Voir le lien à la suite de ma réponse.
Tant que l’on ne maîtrise pas ces particularités de l’affaire, on ne peut l’approcher sereinement, et il est évident que si vous abordez la lecture de mon livre avec des «fondations» erronées, la compréhension en sera impactée… ( les quelques remarques sur les droits d’auteur, Octonovo, Cros et Saunière s’expliquent par cette méconnaissance de ces vieux papiers)
Travail, travail… d’où l’intérêt de revoir de plus près les « vieilles lunes déjà démontrées depuis plus de 25 ou 30 ans » avec un logiciel réinitialisé !
Oui, je suis obsédé (je reprend votre terme, comprenez que je dise passionné…) par le Rapport Cros, parce que je crois que ce document a été fondamental pour l’évolution de l’affaire, pour sa transformation d’un mystère local à un mythe international ! On peut bien sûr n’y pas croire, mais si on s’y enfonce comme je l’ai fait, on y découvre des éléments qui nous permettent d’appréhender mieux notre énigme. Travail, travail…
Idem pour le Parchemin, je ne m’intéresse absolument pas de savoir qui l’a écrit, je ne considère que sa datation et son architecture cryptographique, d’où mon intérêt pour Fatin et pour la manière dont PP aurait pu avoir accès au relevé SESA… Travail, travail…
Bref, en vous remerciant encore une fois d’avoir pris du temps pour ma contribution à la bibliographie castelrennaise, je rappelle que je donnerai une conférence à Rennes le Château, vendredi 18 août à 18 heures à la salle de la Capitelle : « Les trois trésors de l’abbé Saunière ». Je présenterai et dédicacerais mon livre également.
Je précise aussi qu’il sera possible de filmer la conférence et de la diffuser en ligne (ma dernière conférence à Rennes : bientôt 4000 vues !)
Bonne journée,
https://www.renneslechateau.info/category/dossiers-secrets/
M. Duquesnois.
La rapidité de votre réponse me conforte dans l’aspect passionnel qui vous fait appréhender cette affaire. De même, c’est sur le ton de la polémique – clairement assumé – que j’ai voulu vous interpeller.
Ma réaction n’a rien d’épidermique. Il y a ceux qui y croit et ceux qui n’y croit pas. C’était la méthode, et l’esprit avec laquelle vous la déployez, qui me laisse un goût amer. Vous pouvez vous en défendre, mais l’impression de votre incrédulité est bien réel lorsqu’on referme votre livre.
Je ne vous discute pas les procédés mis en oeuvre pour discréditer tout le montage Plantard. Je vous approuve sur ce terrain-là. En revanche, rien ne vous fait douter que les parchemins pourraient être “authentiques” (une authenticité relative, puisque j’estime qu’ils ont été créés entre 1895 et 1901 – et pour dire plus, ils étaient même au nombre de 3 !).
Je sais qu’en attribuer la conception à Plantard est votre marotte. Voici quelques années, vous aviez fait voir que la cryptographie pratiquée était digne des énigmes de l’almanach Vermot. Mais, qui vous dit que ces parchemins auraient été élaborés par de grands esprits ? Je pense, au contraire, que toute cette affaire s’en ressent d’une certaine improvisation et d’une évidente précipitation.
Concernant ma remarque (que vous désapprouvez) au sujet de la pertinence du témoignage de Laurent Buchholtzer en rapport avec la rencontre Marius Fatin/Pierre Plantard, vous me tendez la perche pour signaler son observation relative au contrat Julliard (p. 61). Pourquoi ne pas aller dans son sens cette fois encore ?
Je vous le répète, j’ai apprécié votre livre. Le bien-faire est votre crédo, d’autant que les travaux d’enquêtes sur Rennes sont rares. J’aurai donc grand plaisir à figurer dans le public pour vous écouter ce vendredi 18 août, à Rennes-le-Château, et, si possible, à filmer cette intervention pour en faire profiter ensuite les chercheurs et les curieux en ligne (dixit “Nostradamus”, près de 4000 vues.)
Cordialement.
Bonjour monsieur Vallet,
Je voudrais préciser deux ou trois petites choses sur les objections faites dans votre réponse. Mais comme toujours, ce n’est que mon avis, je pense pourtant qu’au moins dans ces 2 cas… il est solide.
Le contrat Julliard : Contrairement à certaines lettres qui charpentent l’histoire de RLC (lettre de Cherisey à Plantard, lettre de la société des libraires anglais à Fatin, lettre de Saunière à Cros, et j’en passe…) et dont on se demande ce qu’elle font dans le domaine public, celle qui concerne ce contrat Julliard émane de Pierre Plantard et le contrat ainsi que la lettre qui l’accompagne lui étaient adressés, libre à lui de les diffuser…
Dans un article titré : “Pierre Plantard de Saint Clair répond à Pierre Pons”, Patrick Mensior écrit : “En 2003, j’adressais aux éditions Julliard la copie des pages du contrat produites par Pierre Plantard dans sa mise au point en leur demandant si elles étaient bien conformes à celles de l’exemplaire en leur possession. Hélas, ma demande est restée lettre morte.” En 2003, Gérard de Sède vit encore, si vraiment ce document était un faux, les éditions Julliard l’aurait simplement dit, le fait de ne pas répondre est selon moi une reconnaissance de fait de la justesse de l’affirmation concernant la répartition des droits d’auteurs…
Patrick Mensior, dans son article signale que Gérard de Sède n’a jamais contesté non plus ce document (paru en 1979, je le rappelle…)
Mais dans mon livre, je ne cite ce contrat que pour signaler que Philippe de Cherisey ne fait pas partie des auteurs initiaux et qu’il n’a pas droit, lui, aux retombées financières. Comme, un témoin m’a certifié que le marquis de Cherisey et Gérard de Sède avaient souvent des mots au sujet de ces droits d’auteur, j’imagine que c’est parce que c’est lui qui amène l’affaire aux deux autres, grâce à sa proximité avec Denise Carvenne, du Club des Chercheurs de Trésors (et cela bien avant 1960). Je propose donc de lui donner le titre d’apporteur d’affaires, mais ce n’est qu’une… proposition.
Pour les parchemins, c’est autre chose, et je ne peux pas donner de réponse ici, par contre je peux dire que ce cryptage n’est compliqué que parce qu’il juxtapose 5 codes simplistes, c’est la structure, l’architecture du système qui en fait une construction complexe et géniale…
“Le premier exercice consiste à éliminer du document II les lettres parasitaires qui ont été introduites…” c’est par ces mots que Philippe de Cherisey commence son explication sur le décodage du document II (Grand Parchemin) dans « Le Testament du Prieuré de Sion » de J.L Chaumeil que vous avez édité.
Si vous le souhaitez, j’afficherais ce Grand Parchemin à l’issue de ma conférence du 18, je mets au défi quiconque de dire comment on peut faire pour arriver à la solution (???) en suivant les conseils du Marquis…
De mon côté je m’engage à montrer en deux petites minutes chrono (5 diapos) comment ce codage a été réalisé…
Et chacun se fera une idée…
Compliments (cela nous rajeunit)
Philippe “Philemon” Duquesnois