Reportons-nous à ce livre collégial, signé conjointement Duquesnois-Lange-Lucain-Mazières et intitulé : Rennes-le-Château, compléments d’enquêtes 1. L’un de ces auteurs, Jean Lucain, planchant sur l’épitaphe de la marquise d’Hautpoul-Blanchefort, après en avoir signalé les incongruités, et telle qu’elle a été publiée dans un bulletin de la SESA (Société d’études scientifiques de l’Aude) de l’année 1906, la met en parallèle avec une brochure parue simultanément avec pour titre : Requies catin pace.
Petit opuscule d’une soixantaine de pages (1), il a pour auteur un de ces poètes occitans du nom de Paul Albarel. Il est ce qu’on appelle un félibre pur sucre. Il sera l’ami de Prosper Estieu, qui fut un instituteur (exécré) à Rennes-le-Château. Ensemble, ils participèrent à l’aventure littéraire de la Cigalo Narbouneso.
C’est moins le contenu que le contenant qui a retenu l’attention de Jean Lucain.
Il n’y a pas à se faire d’illusions, Requies catin pace est une pochade beaucoup moins réussie que le Sermon du Curé de Cucugnan, que Daudet a soufflé au provençal Joseph Roumanille. Mais, notre ami Jean y a retrouvé cette fameuse césure qui tracasse fort les épigraphistes castelrennais, où l’infortunée défunte se voit gratifiée de l’épithète peu reluisante de catin.
Franchement, n’est-ce pas tiré par les cheveux que de faire un rapprochement entre ces deux séquences latines où cinq lettres sorties de leur contexte ont des allures de complot ?
La vraie question est celle-ci : pourquoi cette “épitaphe” a-t-elle été publiée en 1905 ? (Rappelons que l’achevé d’imprimer du bulletin de la SESA est de novembre 1905).
Reproduite dans le contexte de la publication d’une excursion organisée le 25 juin 1905, l’affaire tient en 4 lignes :
— Une visite au cimetière nous fait découvrir dans un coin ] une large dalle, brisée dans son milieu où l’on peut lire une ] inscription gravée très grossièrement.] Cette dalle mesure 1m 30 sur 0m 65. ]
Et pour le coup, on nous assène une… stèle intacte, à l’inscription impeccablement conservée. Las !
Le proverbe dit : Le sage montre la lune, l’idiot regarde le doigt…
Où est-il écrit que la graphie reproduite est en rapport avec l’observation qui est faite dans le cimetière ?
En réalité, ce n’était pas la seule pierre tumulaire “historique” de ce lieu.
On sait que dans les jours, les semaines ou le mois suivant l’excursion, une dalle fut emportée (sans doute cette pierre tombale de 1,30 x 0,65 m). J’en ai déjà donné les raisons : I C I
En tout cas, il est probable que la stèle vétuste de la marquise d’Hautpoul-Blanchefort n’était déjà plus dans le cimetière en 1905. Le ménage avait été fait en 1895, lors des travaux de transformations voulus par la municipalité de Rennes-le-Château.
C’est assez dire que la graphie publiée en 1905 entre dans un schéma beaucoup moins simpliste que ne le voudrait quelque incrédule.
Si l’on voulait chercher un modèle à la graphie publiée, l’acte d’inhumation de la marquise serait plus appropriée. Pour tout dire, cette épitaphe divulguée, c’est le brevet d’authenticité des deux documents connus sous le qualificatif de Grand et Petit parchemin. Un troisième existait, mais il nous est inconnu. Sans doute est-il perdu…
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(1) Réédité en 2018 par un éditeur-libraire de Béziers, Le chameau malin. Les dessins d’origine de Gaston Cugnenc ont été conservés et les textes en occitan ont été traduits en français.
Intox absolument
L’inventaire Stublein n’existe pas
Effectivement, le livre de Stüblein , “Pierres gravées du Languedoc” est un apocryphe constitué de figures récupérées à diverses sources. Mais également, ce rapprochement des deux dalles est un leurre. Cela signifie seulement que l’interprétation de l’une et de l’autre sont partie prenante.