Il y a quelques mois, le vidéaste Philippe Brunel lançait une cagnotte pour aider au financement d’un DVD consacré à l’affaire de Rennes, avec ce titre annoncé : Les secrets du Razès. Selon la participation, il était ajouté un livre intitulé Paroles de chercheurs, où sont retranscrits plusieurs entretiens parmi ceux figurant dans le bonus d’un DVD précédent, portant sur le même thème, et intitulé : L’abbé, le diable et les chercheurs (2018).
Si le DVD a été retardé pour des questions techniques et reporté au mois de novembre 2024, le livre a été adressé à tous les souscripteurs qui ont cautionné le projet. Je fus l’un d’eux.
J’ai donc reçu, fin août, le livre d’entretiens comme convenu. Un choix a été fait parmi les participants du bonus. Il s’agit de Jean-Pierre Monteils, André Galaup († 2021), Henri Mariou († 2018), Josette Barthes († 2020), Germain Blanc-Delmas; enfin Guy Gentil († 2016).
Ces entretiens, je le rappelle, ne sont que la transcription des phrasés que l’on peut entendre sur la vidéo ou le bonus. À ma décharge, je n’ai sans doute écouté ces interventions qu’une fois ou deux, et encore sans y accorder la même attention respective. Mais, à les lire, la réflexion est différente.
N’ayant rien à redire du témoignage parlé de Guy Gentil, il en est autrement lorsqu’on le lit. À la question de Philippe Brunel, à savoir par quel truchement Guy Gentil se serait intéressé à l’affaire de Rennes-le-Château, celui-ci évoque les 3 articles de la Dépêche, parus en janvier 1956. Pourquoi pas…
Seulement, un paragraphe plus loin, il évoque le livre de Robert Charroux : Trésors du monde et fait cas du chapitre qui évoque Pierre Alquier, le “trimardeur de Perpignan”. Or, le passage consacré à Pierre Alquier ne figure que dans la seconde édition de Trésors du monde, paru en 1972 ! (La première datant de 1962).
Fort de cette info, Guy Gentil le rencontre. Effectivement, Alquier lui raconte, qu’ancien fossoyeur pour la commune de Rennes-le-Château, son travail lui aurait permis de mettre au jour un souterrain, “où trois hommes à cheval pouvaient se tenir”. Bravant l’obscurité de ce conduit, il aurait alors découvert des panières pleines de monnaies et des armes “comme les Romains” (!) Pour le coup, l’homme aurait rempli sa bérette (petit béret) de pièces d’or et d’argent.
Un peu interloqué, Guy Gentil lui demande ce qu’il a fait de ce pécule. L’autre lui répond qu’il est allé à Mazamet et y a vendu son or. Qu’a-t-il fait de la somme recueillie ? s’enquiert l’ami Guy, et de s’entendre répondre : “J’ai acheté un bar à Espéraza”. Mais il ne l’a pas gardé bien longtemps, puisqu’Alquier, par la suite “a flingué sa femme et a pris 20 ans de prison”…
Passant outre, Guy Gentil a demandé au trimardeur de venir avec lui dans le cimetière de Rennes-le-Château et de lui montrer l’endroit de sa découverte. Alquier y consentit.
Profitant de cette confidence, Guy Gentil organisa une expédition destinée à retrouver le souterrain au bout duquel se trouvait le trésor. Pour cela, il rameuta quelques allumés…
Dès ce moment, le témoignage de Guy Gentil devient flou, sinon erroné. Il subordonne cette fouille sauvage au témoignage d’Alquier. À 5 heures du matin, explique-t-il, on était tombé sur le granit. On a tout arrêté. Et d’expliquer ses ennuis de voiture au retour. Ajoutant qu’il avait 34 ans au moment des faits.
Or, peu avant qu’il ne fasse état de cette aventure qui a tourné court, il a également évoqué une autre incursion nocturne dans le cimetière de Rennes-le-Château, précisément “dans la nuit du 2 au 3 novembre 1968”. Et de préciser, cette fois encore : J’avais 34 ans. Et, là, il souligne bien qu’il est allé sur l’emplacement que lui avait indiqué “le SDF, Pierrot.” (Pas de doute, il s’agit bien de Pierre Alquier). Là encore, notre joyeux drille est tombé sur du granit. Donc on a laissé tomber…
Il est bien évident qu’il n’y a pas eu deux équipées nocturnes, mais une seule. Et l’on reconnaît bien celle qui a défrayé la chronique à l’époque et qui a suscité le courroux de Gérard de Sède bien embêté d’une telle histoire un an après la sortie de l’Or de Rennes ! (La Dépêche du Midi du dimanche 17 novembre 1968).
Tout aussi problématique est l’affirmation de Guy Gentil justifiant ses fouilles dans le cimetière au prétexte que Pierre Alquier lui avait fait des révélations. Impossible ! Puisque notre narrateur n’a pu connaître le trimardeur qu’ après mai 1972 (date de parution du livre de Robert Charroux). Peut-être faut-il se rallier à l’explication de Gérard de Sède dans son communiqué, déplorant que l’on ait tenté de forcer la tombe Rougé, de ce défunt qui trouva un bloc de marobotins, aux Charbonnières, en contrebas du château du Bézu.
Or donc, que l’ami Guy ait été l’auteur de cette recherche clandestine dans le cimetière de Rennes-le-Château, une nuit d’hiver de 1968, n’est pas pour nous étonner. C’était un secret de Polichinelle pour qui connaissait le personnage.
Le reste de son récit lui appartient. Sinon cette confidence d’Edgar Faure à lui faite au sujet de documents coptes cachés à Rennes-le-Château, qui ferait trembler l’Église Catholique.
Bis repetita, le feuilleton continue.