Sans l’affaire de Rennes, il est probable que les diverses contributions de Louis Fédié, au sujet de la Haute Vallée de l’Aude, serait à peu près oubliées, tout au plus évoquées de loin en loin. Il est surtout l’auteur d’un seul livre : Le Comté de Razès et le diocèse d’Alet, paru en 1880, chez Lajoux Frères, libraire-éditeur à Carcassonne.
Sa longue notice sur Rhedœ a permis à une catégorie de commentateurs du fait historique de faire « savant » à moindres frais.
Prélude à cet ouvrage, un mémoire d’une cinquantaine de pages qu’il avait écrit sur l’histoire du Haut-Razès et qu’il avait proposé, en 1867, à la Société des arts et des Sciences de Carcassonne, qui venait d’ouvrir un concours destiné à récompenser les meilleures études monographiques intéressant le département.
Son travail lui valut les félicitations du jury, une médaille d’or de 200 F et la publication de son étude dans les Mémoires de la société des arts et des sciences de Carcassonne (t. IV, 1ère partie, 1879).
En 1873, il devint membre de cette institution. Elle fut pour lui comme une « seconde famille », lui faisant don d’ouvrages, de collections de journaux et même de plusieurs vestiges archéologiques (fossiles, monnaies, fers de lance…) trouvés par lui à Couiza et dans les environs.
En effet, Louis Fédié était originaire de Couiza, il y était né en 1815. Il apprit le latin et fit des études de droit. Elu en 1848 conseiller général, il siégea pendant quatre ans à l’assemblée départementale. Dans le même temps, refusant par deux fois les fonctions publiques qui lui étaient proposées, il préféra se consacrer à l’Histoire et, particulièrement, à celle qui concernait son pays natal.
En 1877, il parraina l’abbé de Roquelaure, curé de Carcanières, qui proposait une vaste étude sur le Donezan et le Capcir. Il en favorisera la publication deux ans plus tard.
Dès 1881, Louis Fédié va égrener les ouvrages ponctuels. Cette année-là, il traduit et analyse une bulle sur papyrus du pape Agpet II ; en 1882, il fait paraitre un travail sur une construction défensive de Carcassonne, la bastide de Saint-Louis-de-Parahou ; en 1884, il étudie un lot d’archives de l’abbaye de Lagrasse ; en 1890, il relate une inondation à Couiza, d’après un texte original, et fait connaître l’étrange existence d’une croix votive nichée dans un édicule construit le long de l’ancienne route de Coustaussa.
En 1896, encore, Louis Fédié proposa à ses collègues des Arts et des Sciences de Carcassonne de faire bon accueil à un nouveau travail sur la phonétique, que l’abbé Henri Boudet souhaiterait publier pour faire suite à son précédent essai paru en février 1894, dans le tome VII des Mémoires de cette académie. Il semble que Fédié ne fut pas entendu, puisque ce texte du Curé de Rennes-les-Bains resta inédit.
On sait les reproches qui furent adressés à l’abbé Boudet, suite à la sortie du livre La vraie langue celtique. Il faut dire que Louis Fédié ne fut pas non plus épargné.
Principalement en faisant grief à l’historien couizanais de ne jamais citer ses sources. Le lecteur attentif n’avait pas d’autre choix que de lui faire confiance. J. Tolras de Bordas, qui a lu son livre sur le Comté de Razès, s’ insurge : « Quand d’anciens actes sont cités, il faut que le lecteur soit mis à même de recourir aux textes ; or, pour cela, l’auteur doit tout au moins renvoyer aux Recueils ou Collections, ce à quoi M. Fédié s’exonère. L’absence presque complète de renvois et de citations ne peut que diminuer la valeur et l’autorité de son livre où, d’ailleurs, pour notre part, nous croyons avoir remarqué plusieurs erreurs, que nul document n’éclaire et ne justifie dans le sens de l’auteur. » (Revue des questions historiques, citée par Patrick Mensior, « Quelques remarques sur l’œuvre de Louis Fédié », janvier 2012)
N’oublions pas que c’est Louis Fédié qui place sur le plateau de Rennes une population de trente mille âmes à l’époque des Wisigoths ! C’est lui encore qui participe à la croyance selon laquelle deux villes jumelles auraient coexisté en ces lieux jusqu’au XIIe siècle, une ville haute et une ville basse, sur le modèle de Carcassonne. Or, cette disposition, qui a fait florès auprès de la plupart des « historiens » de Rennes, a récemment été remise en cause par Paul Saussez, un chercheur et architecte belge, qui démontre que la confusion vient d’une lecture erronée de Louis Fédié d’un acte de vente entre Ermengarde, fille de Pierre Raymond, comte de Carcassonne, et Raymond Roger, comte de Barcelone, datant de mars 1067. Fédié aurait fait peu de cas du nom de Redae, qui désigne le castrum, et celui de Redez, qui englobe le comté de Razès. Les deux places fortes citées dans l’acte ne sont pas de Rhedœ, mais du Razès.
Autre camouflet, celui du cas Davilla, ce consul de la ville basse de Carcassonne qui serait mort en défendant les remparts contre les hordes du Prince Noir en 1355. Fédié était parvenu à convaincre la municipalité de Carcassonne de donner le nom de ce héros à l’ancienne porte de Toulouse. Les choses restèrent en l’état jusqu’en 1950, date à laquelle on s’aperçut que Fédié avait pris la mention “Lo Consul da villa” (Le Consul de la Ville) pour un nom patronymique. En fait, il se serait agi d’un certain Arnaud de Villar.
Fédié s’en alla le 17 novembre 1899 après une brutale maladie, quelques années après son épouse Pauline Baux, non sans avoir fait ses preuves de poète. En 1892, en effet, à la condition de l’Escola audenca, ainsi qu’aux fêtes de la Sainte-Estelle l’année suivante, il composa des vers en langue d’Oc que publia la Revue Méridionale.
Lui rendant hommage dans cette même Revue Méridionale, le colonel Grillères terminera ainsi :
Adieu, Fédié, repose en paix.
Références de lecture :
Revue Méridionale, décembre 1899, pp. 143-144, in “Notice nécrologique sur Louis Fédié”, par le colonel Grillères
Mémoires de la société des Arts et des Sciences de Carcassonne, t. IX, 4e série, 1976-1978, pp. 171-172, “Notice sur la vie et l’oeuvre de Louis Fédié”, par Jean Fourié
Oui cher Michel mais Louis Fédié fonctionne en – collusion – avec Boudet autour d’une elle histoire que Fedie complète